Pid Zolotoyu Rozoju
Sous la Rose Dorée
Beneath the Golden Rose
Au bout de la rue Starojevres'ka, au cœur du centre ville, à la limite des anciens remparts, se trouvent sur une place vide, les ruines de la synagogue de la Rose dorée. Cette synagogue privée mais ouverte au public, datait de la fin du 16e siècle. Seul l'arrière de la synagogue est aujourd'hui visible ainsi qu'une partie du mur de la Grande synagogue qui lui était mitoyenne.
Détruite par les nazis en 1942, ces ruines sont le seul édifice à rappeler l'ancienne présence juive de la ville. Même si de nombreuses marques de Mezuzah (cylindre contenant un extrait de la Torah) sont visibles sur le pas des portes avoisinantes. Paradoxalement, le site a été préservé par les autorités soviétiques sous la pression de l'OCDE dans les années 1960.
Alors que la place est aujourd'hui vide, la beauté du lieu attire les jeunes mariés pour leur séance photo ou les jeunes ukrainiens envahissant les places publiques au premier rayon du soleil. Les remparts médiévaux, les arcades de la synagogue en partie cachées par la verdure et les anciens
bâtiments en font un site
touristique incontournable mais surtout un endroit paisible.
Seuls ceux qui regarderont par terre remarquerons les quelques stèles juives de la synagogue. Les nazis puis les soviétiques s'en sont servies pour paver la place. On peut y voir quelques inscriptions que le temps à épargnées dévoilant une date, un nom.
Au coin de la place, se trouve le restaurant Pid Zolotoyu Rozoju (Sous la rose dorée) et son agréable terrasse en bois. Ce restaurant, dont la thématique est la culture juive de Galicie, fait parti de la quinzaine de restaurants d'ambiance éparpillés dans Lviv qui utilisent des thématiques historiques. Ainsi, on peut manger à Gazova Lampa (lampe à gaz – inventée à Lviv), Mazure (père du masochisme né à Lviv), Kriyvka (dédie aux héros de l'insurrection ukrainienne – UPA)...
Quant on rentre dans le restaurant Pid Zolotoyu Rozoju, on est saisi par l'ambiance feutrée et joyeuse. Une musique juive et des films d'époque en fond, des dessins de Bruno Schultz sur les murs, des napperons et chandeliers... Les employés vous accueillent avec un 'Shalom' souriant et sont capables d'avoir une conversion de courtoisie en hébreux. On vous invite à vous asseoir et vous présente un menu illustré de peintures et photographies juives dont la lecture s'effectue de droite à gauche.
La plupart des clients sont des Lvivois ou des touristes européens, américains, israéliens... Ils apprécient cet endroit chaleureux où la nourriture y est très bonne. Avant le repas, le serveur vous invite à vous laver les mains en vous apportant une jarre et une cuvette en métal, selon la tradition juive. Les plats sont régulièrement accommodés et renouvelés. Les recettes sont juives mais la nourriture n'y est pas kasher – question de facilité, le seul fournisseur étant à Kiev. Il servent cependant du matza et de la vodka kasher.
Les prix des plats ne figurent pas sur le menu. Ils sont négociés en fin de repas avec le serveur. Un feuillet de deux pages vous explique pourquoi ce restaurant et la motivation du propriétaire et des employés. Comme si une justification était nécessaire.
Le problème de ce restaurant paraît simple mais suscite beaucoup de controverses au sein de la communauté juive. Outre le fait qu'à l'entrée du restaurant, vous puissiez essayer des chapeaux juifs auxquelles ont été ajoutées des payots (longues mèches aux oreilles) (1), la terrasse du restaurant se trouve sur le terrain de l'ancienne synagogue. Sans parler de l'aspect foncier, le lieu n'est pas tellement propice au divertissement et à la consommation d'alcool. L'utilisation du stéréotype des Juifs riches (négociation des prix) ne passe pas non plus très bien au sein d'une communauté particulièrement pauvre.
Le meilleur argument invoqué par la manager pour justifier le bien fondé de son restaurant est qu'il constitue l'unique endroit dédié à la culture juive et lui donne donc une visibilité au public. Le restaurant et son équipe, particulièrement jeune, font en effet de leur mieux pour respecter et faire découvrir la culture juive aux clients.
Mais l'enjeu est avant tout de faire du 'business'. C'est comme cela qu'on le conçoit du côté du restaurant et de la majorité des Juifs de Lviv.
Beaucoup regrettent que l'initiative d'ouvrir un autre restaurant ne soit pas prise par quelqu'un de la communauté. Plusieurs évoquent l'ouverture d'un restaurant juif plus respectueux des traditions dans l'autre quartier juif de l'époque, Krakivski. Peux ont le courage de se lancer dans une aventure perdue d'avance. La concurrence du restaurant Pid Zolotoyu Rozoju particulièrement bien placé et la corruption en font un doux rêve.
Blandine Scrève
Adresse du restaurant : http://visitlviv.net/restaurant/en/galician-jewish-restaurant-tavern-pid-zolotoyu-rozoyu-beneath-the-golden-rose/
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